VENDREDI 13 No2 (LE TUEUR DU VENDREDI) : Chéri, Fais moi Peur

Publié le par Dr Devo

Ladies and Gentlemen,

 

Il est difficile de résister à la tentation encyclopédiste d'ouvrir le coffret de la presque-intégrale "Vendredi 13", dont j'évoquais hier le numéro 1 (presque-intégrale car le premier n'est pas produit par Universal mais par Warner, et par voie de conséquence il est absent du coffret. Quant aux deux ou trois derniers de la série, ils sont publiés séparément). Appliquant le conseil que je vous donnais dans mon précédent article sur le sujet, et aidé par mon ami le Marquis qui avait disposé son intégrale complète bien en vu (car sa rigueur janséniste l'a évidemment poussé à acheter les dvds absents du coffret pour les raisons sus-nommées), je me suis donc vautré encore dans les eaux troubles de Crystal Lake en compagnie de Jason, notre touchant psychopathe, en regardant ce "Vendredi 13.2, le Tueur du Vendredi".

 

Le film démarre cinq ans après le premier épisode, toujours à Crystal Lake. Ça commence plutôt bien avec une séquence qui se focalise sur la seule survivante du No1. Allongée sur son lit, la jeune fille, encore hantée par le souvenir tenace de Jason Voorhees, fait un cauchemar, et c'est rien de le dire, qui la ramène aux sanglants événements qu'elle a connus. La séquence est doublement astucieuse. Tout d'abord à Steve Miner, qui avait réalisé le premier et rempile ici, de citer l'opus 1, larges extraits à l'appui, extraits qui résument presque dans son intégralité la fin de l'opus 1, dont je vous parlais avec délectation hier. Double-plus-bon donc, car c'était de loin la plus belle séquence avec superpositions d'images dans le même plan, avec ces superbes dialogues d'une emphase aussi embrouillée que surréaliste par Betsy Palmer (qui joue la mère complètement folle de Jason), le tout baignant dans un agréable sens du baroque. En plus, revoir cette Betsy Palmer est un délice dont on savoure chaque seconde. Petite star à l'époque (fin des années 70 pour le premier épisode), l'actrice avait accepté ce petit rôle dans ce film à budget modeste pour se payer une nouvelle bagnole. Des années après, le succès et la longévité de la série feront qu'elle aura acquis un statut culte UNIQUEMENT grâce à ces films qui ont éclipsé ses succès de jadis, de fort modeste facture, il faut bien le dire. En voilà une, donc, qui était star et qui a été sauvé de l'oubli par un cacheton! Jolie anecdote. Passons. Autre intérêt de cette séquence d'introduction, disais-je avant de grossièrement m'interrompre moi-même, le flash-back est superposé au sommeil de la pauvre survivante. N'importe quel tâcheron aurait fait s'endormir le personnage puis balancé le flash-back, avant de la faire se réveiller. Ou alors flash-back direct puis réveil. Là que nenni. L'artisan Steve Miner superpose et le sommeil du personnage et son cauchemar. Déjà, c'est très malin et très original du point de vue de la narration (le procédé est assez rare quand même). De plus, cette superposition est elle-même doublement étonnante car l'image de la fille en train de dormir et les images du flash-back se superposent dans le même plan. Vous suivez? Non bien sûr alors je résume: jusqu'ici double superposition narrative et visuelle. Mais ce n'est pas fini. Ce système de superposition double atteint la puissance 3 (au cube) car si vous vous souvenez du début de ce paragraphe, on revoit des images du Vendredi 13 No1 qui utilisaient déjà elle-mêmes des superpositions visuelles (d'images dans le même plan). C'est vraiment très gourmand et ça illustre parfaitement la spirale de la hantise: le souvenir de Jason hante l'héroïne à plusieurs niveaux plastiques et narratifs comme un jeu de miroir sans fin. C'est, par-dessus le marché un sans faute accompli avec brio sur le plan sémantique et je dis chapeau bas!

 

Ces délicieuses mignardises ne durent pas et dès la deuxième séquence (après quatre minutes de film donc!), retour à la normale. Nous suivons donc un groupe de jeunes monos qui s'apprêtent à organiser un camp de vacances non pas sur le site même de Crystal Lake, mais 20 ou 30 mètres plus loin. Ces monos sont tout à fait dans le style de l'épisode 1: beaux gosse (dont l'obligatoire mignonnet, blond bien sûr, et le beau brun ténébreux), belles jeunes filles dont la blonde héroïne (qui sort d'ailleurs avec le blond sus-mentionné, ça ne s'invente pas, c'est un métier!) qui a d'ailleurs un minois assez particulier mais que j'ai trouvé curieusement assez antipathique, sans que j'arrive vraiment à mettre le doigt dessus. En fait, je crois, de mon strict point de vue, que cette actrice est méchante. C'est comme ça. On trouve également, et c'est assez amusant, un handicapé en chaise roulante (beau gosse dont on apprend qu'il est d'ailleurs sexuellement actif, mais qui n'aura pas vraiment le temps de le prouver ; je signale d'ailleurs en passant que je parlerai de la sexualité dans la série Vendredi 13 dans un prochain article sur ce même site), dont on ne présume guère des chances qu'il a d'échapper à Jason. Déjà les victimes de ce dernier ont du mal à échapper, en courant partout comme des dératés, à son omniprésence, vous pensez bien que quand on voit le pauvre gars débarquer dans sa chaise, on esquisse un sourire un peu sadique je vous l'accorde. Il y a aussi un couple cool, formé par deux clones de Matt et Jenny qui auraient grandi. Et enfin le freaks-ringard-marginal-mais-sympa de service dans la personne d'un garçon qui, outre son comportement un peu navrant à base de blagues nulles comme l'oblige le scénario, a le bon goût de se balader du haut (près de 1.90 mètre je pense) de ses 30 kilos tout mouillés (là où les autres mecs sont tous des athlètes, of course) habillé en polo rayé ou chemise jaune à gros carreaux vichy, pataugas, chaussettes de montagne et tignasse (je vous le donne dans le mille) rousse! Bref, une belle brochette de victimes dans tous les sens du terme, tous très "charactérisés". Rien d'anormal bien au contraire (je crois que j'ai battu dans ces dernières phrases mon record de parenthèses, c'est cool).

 

Notons une chose. Les canons sont mis en place et c'est important pour voir la pertinence des variations qui seront apportées dans les épisodes suivant de la série. Ces canons sont: la caractérisation des personnages (on vient de le voir, tiens encore une parenthèse), le camp de vacances avec monos, le lac avec une scène de plongeoir dans les deux épisodes, le flash-back introductif reprenant le climax final de l'épisode précédent. Et Betsy Palmer, l'omniprésente mère de Jason dont on espère bien, même si on ne sait comment les scénaristes seraient capables de cet exploit, qu'elle apparaisse dans le flash-back introductif du troisième épisode. Le petit vieux, cinglé du village, qui avertit les jeunes imprudents de ne pas aller à Crystal Lake et leur conseille de rebrousser chemin. Là, nos héros doivent rigoler devant ce freak et, le vieillard doit prononcer la formule incantatoire (et génialement délicieuse car cette réplique est débile et l'acteur n'a rien à envier à la modestie du jeu de Betsy Palmer): "you're dooomed! You're dooooooooomed". Enfin, la dernière scène doit absolument montrer la survivante "tuer" Jason, puis  montrer que celle-ci rêve qu'il est encore vivant.

 

Quant au reste du film, c'est la gentille routine. Parmi les jeunes les couples se forment. Un d'eux essayera de faire l'amour avant d'être grossièrement interrompu par Jason (ou alors Jason exerce son art pendant le fumage de la post-cigarette!). J'entends un bruit de branche dans la forêt, j’ai très peur mais ouf, ce n'était rien. J'entends un bruit dans la forêt mais ouf, c'était juste la musique du film. J'entends un bruit dans la forêt, mais ouf, c'était machin qui me fait une blague avec un couteau en plastique. Tiens, je vais sortir faire un tour dans la forêt. Tiens, je vais aller me baigner au bord du lac (et bien sûr enlever mon maillot de bain). Tiens, je vais aller voir si la voiture démarre. Tiens, je vais aller changer les plombs qui ont sauté. Tiens, je vais aller couper du bois. Etc, etc.. Pendant ce temps, Jason les observe, les observe et les observe encore à travers les branchages. La routine, tranquille et assez agréable. Le charme de la série. Avec de temps en temps une bizarrerie de mise en scènes ou un léger bâillement. Dans les eux cas, ce n'est pas désagréable, bien au contraire. "C'est ça qu'on veut".

 

On note quand même, dans ce deuxième épisode, que le slip de bain très suspect de Kevin Bacon (voire précédent article) a disparu. Remplacé quand même, mais ouvertement contrairement à cet épisode du "slip", par une scène de parfumage où une actrice révèle, et par deux fois en plus, la plus improbable des façons de répandre son No5 (Chanel No5 hein, pas Vendredi 13 No5!!!). Le meurtre très étonnant du vieux cinglé (comment vont-ils faire dans l'épisode suivant pour avertir ces jeunes du danger qu'ils ignorent?). Et aussi, l'incroyable ouverture de porte par la dernière survivante, fourche à la main, bien décidée à embrocher Jason... La porte s'ouvre et on retrouve le petit chien Muffin qui s'était perdu dans la forêt au début du film, allusion bien involontaire au magicien d'Oz sans doute.

 

Vous en savez assez pour vous précipiter avec gourmandise sur ce joli dvd.

 

Ne me remerciez pas, c'est bien normal, je vous en prie.

 

 

 

Obligatoirement Vôtre,

 

Dr Devo

 

(chanson de la semaine : "Example #22" de Laurie Anderson)

 

 

 

 

Publié dans Corpus Analogia

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L
Personnellement, je boude un peu la conclusion, avec cette mystérieuse ellipse lorsque l'affreux Jackie défonce la fenêtre. Cut. Qu'est-il donc arrivé au boyfriend ??? Pourquoi l'héroïne blonde (Amy Steel, oui madame) que je ne trouve pas antipathique n'a-t-elle pas été trucidée ??? Et qu'arrive-t-il au yorkshire ?????<br /> Mais bon, d'un autre côté, cette séquence de suspense insoutenable, celle de l'ouverture de la porte, lente, extrême, tendue comme un slip de Kevin Bacon (tout est bon dans le cochon), débouchant sur l'apparition de la petite frimousse de Muffin le chien, qu'on croyait pourtant bien mort et enterré, si vivant avec sa petite truffe frémissante, son noeud rose au-dessus des oreilles jolies, son regard malicieux et interrogatif avec ce subtil mouvement penché de la tête... Un plan aussi déconcertant à un instant qui s'y prête si peu, ça vaut tout l'or du monde. Non ?
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L
whoops, votre blog a roté<br /> confondre, donc, le réalisateur de MY FATHER CE HEROS avec celui de MUTANT AQUATIQUE EN LIBERTE, est-ce bien raisonnable ???
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L
Que dites-vous là, malheureux ???<br /> Apprenez que l'opus 1 de cette saga pas africa n'est résolument pas réalisé par Steve Miner, mais bien par Sean S.Cunningham, instigateur de la série et accessoirement producteur de LA DERNIERE MAISON SUR LA GAUCHE de Wes Craven. Confondre le réalisateur de MY FATHER CE
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L
Que dites-vous là, malheureux ???<br /> Apprenez que l'opus 1 de cette saga pas africa n'est résolument pas réalisé par Steve Miner, mais bien par Sean S.Cunningham, instigateur de la série et accessoirement producteur de LA DERNIERE MAISON SUR LA GAUCHE de Wes Craven. Confondre le réalisateur de MY FATHER
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L
Que dites-vous là, malheureux ???<br /> Apprenez que l'opus 1 de cette saga pas africa n'est résolument pas réalisé par Steve Miner, mais bien par Sean S.Cunningham, instigateur de la série et accessoirement producteur de LA DERNIERE MAISON SUR LA GAUCHE de Wes Craven. Confondre le réalisateur de MY
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